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"Julien Mijangos chez les Métallurgistes" par Isabelle Lartault

Publié dans le n°2 des bulletins de l'association un/un

 

C'est dans une « maison » dans laquelle on ne rentre pas avec des patins et dont le hall d'entrée affiche ses couleurs sans complexes -du vert et de l'orange pétaradant-, que Julien Mijangos a accepté de présenter sa première exposition personnelle : une installation sculpturale. Il ne s'est pas démonté. Il a compris qu'il fallait prendre le lieu comme il est, tranquillement faire avec.

Le premier jour, il a posé ses trois madriers de sapin en travers du sol, trois bastaings bien charpentés de 5 mètres chacun. Rien de plus, rien de moins. Le deuxième jour, d'un coup de scie, il les a coupés en deux, à peu près au milieu -à peu près, c'est-à-dire sans le chipotage des "machines à calculer", à vue d'oeil, au jugé- et il les a séparés    en conservant l'orientation initiale. Le troisième jour, il a coupé en deux les morceaux déjà coupés et il a continué de les écarter les uns des autres. Le quatrième jour, il a refait la même opération (au cinquième ou au sixième jour, tout compte fait, il a préféré retirer la poussière de bois preuve de l'action passée, mais la question n'était pas de témoigner et la sciure devenait anecdotique ou esthétisante et pouvait même être brouilleuse de lisibilité), et ainsi de suite avec la même régularité, de façon à ce que, sans perdre leur directionnalité, les trois bastaings s'étirent comme des lignes en pointillé jusqu'aux premiers obstacles rencontrés, jusqu’aux limites de l'espace et du temps impartis : sept jours,   un point c'est tout. Un paquet d'une semaine découpé en sept jours d'interventions sur trois bastaings bien compacts que des visiteurs en bloc ou à l'unité auront pu voir entiers et (ou) fractionnés et occupant l'espace un peu, un peu plus, un peu plus encore, un peu plus encore un, un peu plus encore un peu, un peu plus encore un peu plus.

A l'instar des artistes du process art, Julien Mijangos expose les traces visibles d'un processus qui s'est déroulé. Il reprend quelques-uns des principes de l'art minimal (eux-mêmes issus de ceux du constructivisme, de l'art concret puis de l'art systématique et aléatoire) : physicalité des matériaux employés dont le poids et la masse assurent la stabilité, rejet de l'illusionnisme (structure apparente, pas d'utilisation de fixations...), etc.

La ligne de conduite qui sous-tend ce travail n'est pas figée. Il y a suffisamment de jeu, de souplesse pour que la règle, à la faveur d'une imprévisibilité, puisse évoluer. Si la sculpture se cale dans cet environnement-là, une nouvelle mise en place entraînera sans doute une  autre configuration.

 

A la Maison des Métallos, Julien Mijangos a réussi   une exposition "qui tient". Sans patins ni complexes, il s'est imposé avec rigueur et simplicité. On attend avec impatience de voir, la prochaine fois qu'il sera convié à exposer, ce qu'il va apporter à ses hôtes et à ses invités.

Isabelle Lartault

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L’exposition de Julien Mijangos s’est tenue à Paris dans le XIe arrondissement, du 22 au 28 février 1999

 

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